jeudi, novembre 17, 2005

Micro-finance, principaux problèmes

Inter Press Service (Johannesburg)
By Joyce Mulama
Nairobi

La capacité du micro-crédit à sortir les gens de l'indigence a été célébrée dans le monde entier durant 2005, décrétée 'Année internationale du micro-crédit" par les Nations Unies. Au Kenya, toutefois, le concept de micro-crédit risque de perdre son éclat.

Ceci fait suite aux préoccupations relatives à un certain nombre d'institutions s'attribuant le nom de micro-finance, qui ont poussé comme des champignons partout dans le pays ces dernières années, et qui semblent plus résolues à exploiter leurs clients qu'à les aider à travailler pour sortir de la pauvreté.

"Nous organisons des conférences de presse, en mettant l'accent sur nos préoccupations relatives à la prolifération de fausses institutions de micro-finance, et nous publions également des annonces dans la presse informant les gens sur les éléments auxquels il faut faire attention lorsqu'on cherche un micro-crédit", a déclaré Kimanthi Mutua, président de l'Association des institutions de micro-finance (AMFI). L'AMFI tient lieu d'organisation chapeautant 23 des quelque 50 groupes de micro-finance qui opèrent au Kenya.

Toutefois, très peu de mesures régissent le secteur en général : un bureau, un capital de démarrage et une autorisation du conseil municipal permettant à n'importe qui de gérer une entreprise de prêt constituent tout ce qu'il faut. Avec ces choses en main, diverses organisations se sont établies sous la bannière de la micro-finance, mais fonctionnaient plutôt comme des banques, prenant des cautions autres que celles autorisées pour les remboursements de micro-crédit.

La Loi sur les banques empêche toute institution non autorisée conformément à la loi de solliciter ou d'accepter des cautions.

'Kenya Akiba Micro Finance' était l'un des coupables, ayant pris des cautions de près de 7.000 dollars à certains de ses clients.

Certaines cautions auraient été prises sous la condition que Kenya Akiba achèterait des minibus aux clients qui désiraient entrer dans les affaires de taxis. Cependant, les minibus n'ont jamais été livrés, ou ont été saisis. Une autre cliente aurait décrit comment elle a payé une caution pour garantir un prêt qui n'a jamais été octroyé -- alors qu'il lui était impossible de retirer sa caution.

Au début de ce mois, la Banque centrale du Kenya a fermé les bureaux de l'organisation comme une partie des mesures de répression contre des institutions financières douteuses. L'initiative faisait suite à une campagne de publicité de la banque, mettant en garde des groupes non autorisés conformément à la loi sur les banques contre l'utilisation du mot "finance" ou ses dérivés, comme "micro-finance", dans le nom de leurs sociétés pour solliciter des cautions du public.

La fermeture a très peu réconforté des clients angoissés de Kenya Akiba, qui essaient maintenant de rencontrer le président Mwai Kibaki pour qu'il intervienne dans l'affaire, et s'arrange pour que leurs cautions leur soient retournées. L'AMFI considère également la fermeture comme étant trop peu, trop tard. "Même si l'Etat est intervenu pour agir maintenant par l'intermédiaire de la CBK (Central Bank of Kenya), il n'a pas pris de mesures au bon moment", a dit Mutua à IPS.

Un projet de loi sur la micro-finance a été proposé en 2002, mais doit encore recevoir le feu vert du gouvernement et du parlement. "Le fossé laissé par l'inexistence d'une loi sur la micro-finance a créé une ouverture permettant aux charlatans d'opérer. Si une telle loi était en place, l'incident de Akiba ne serait pas survenu", a déclaré Mutua.

Malgré les événements malheureux entourant Kenya Akiba, les passionnés du micro-crédit affirment qu'il fournit un service précieux aux plus pauvres parmi les pauvres, qui peuvent se retrouver exclus des systèmes bancaires conventionnels.

Les banques traditionnelles demandent généralement un nantissement avant d'accorder des prêts, quelque chose auquel les pauvres ont rarement accès.

Toutefois, les plans de micro-crédit peuvent permettre l'octroi de petits montants sans un nantissement conventionnel, comme une propriété. Plusieurs personnes peuvent, plutôt, servir de forme de nantissement alternatif dans des cas où le prêt est octroyé à un groupe. Si un membre du groupe manque à ses engagements par rapport à leur part du remboursement, les autres se portent volontaires pour le remplacer -- et tentent également de prévenir une cessation de paiements à travers des pressions exercées sur les membres du groupe.

"J'ai, par l'intermédiaire de notre groupe de dix femmes, obtenu des prêts auprès de ces sociétés, qui m'ont beaucoup aidée", affirme Njeri Kama, qui a bénéficié d'un micro-crédit. "Depuis cinq ans, je demande des prêts et je les rembourse scrupuleusement. J'ai pu construire un bâtiment de trois étages, que j'ai mis en location à Nairobi. Ceci est devenu maintenant ma source de revenus". Mutua estime que des groupes de micro-finance aident environ deux millions de personnes sur les 30 millions d'habitants que compte la population du Kenya. Plus de la moitié des citoyens dans ce pays d'Afrique de l'est vit avec moins d'un dollar par jour, selon des statistiques gouvernementales.