jeudi, octobre 23, 2008

La liste des Etats réclamant l'aide du FMI ne cesse de s'allonger

La liste des Etats réclamant l'aide du FMI ne cesse de s'allonger
LE MONDE | 23.10.08

Où s'arrêtera la débâcle provoquée par la crise financière ? Après avoir mis à terre les plus grandes banques d'affaires internationales, gelée des pans entiers du marché du crédit, disloqué l'équilibre du système financier mondial, des pays sont aujourd'hui menacés de faillite.

Depuis mardi 21 octobre, l'Islande, surnommé le "petit tigre de l'Atlantique Nord", avec moins de 2,5 % de chômage en 2007, un produit intérieur brut (PIB) par habitant de 39 400 dollars (31 000 euros), en quasi-faillite, se bat pour obtenir l'aide du Fonds monétaire international (FMI). Mercredi, dix ans après la crise qui avait miné son système financier, les craintes de défauts de paiement de l'Argentine ont ressurgi après que l'Etat eut décidé de nationaliser les fonds de pension investis sur des marchés en pleine déconfiture. Depuis janvier, la Bourse de Buenos Aires a plongé de 56 %.

Le Pakistan, au bord de la banqueroute, réclame aussi au FMI une aide d'urgence. La roupie a perdu 25 % de sa valeur depuis le début de l'année et la Bourse de Karachi 35 %. Selon un rapport de l'organisation internationale, les réserves en devises étrangères du pays couvrent ses besoins pour seulement six semaines.

L'Ukraine négocie aussi auprès du FMI un prêt qui pourrait atteindre 14 milliards de dollars. Le FMI reconnaît aussi être en discussions avec la Hongrie et a engagé, jeudi, des négociations avec la Biélorussie. La Croatie, l'Albanie, la Macédoine, sont aussi en sérieuses difficultés."Et la Serbie peut-être aussi", ajoute un économiste.

Comment en est-on arrivé là ? La plupart de ces Etats, n'ont pas, ou peu, investi dans les crédits toxiques, les fameux subprimes à l'origine des turbulences mais sont emportés par les nouveaux développements de la crise.

"DES ÉCONOMIES EN ÉTAT DE SURVIE"
Tétanisés par la crainte d'une récession mondiale, les grands investisseurs internationaux rapatrient leurs avoirs pour les mettre en lieu sûr. Dans les pays concernés ces sorties de capitaux, brutales, affaiblissent les banques et les monnaies locales. Lorsque ces Etats sont endettés en devises étrangères, en dollar ou en euro, par exemple, la dette nationale gonfle alors mécaniquement. "C'est ce qui s'est passé en Hongrie et c'est ce qui arrive aussi dans les pays Baltes", commente un économiste du FMI.

En Hongrie, pour stopper le plongeon du forint (de 48 % par rapport au dollar et depuis mi-juillet) la banque centrale a même dû se résoudre, mercredi, à augmenter son taux directeur de 8,5 % à 11,5 %. Un paradoxe en temps de crise car une telle initiative contribue à ralentir la croissance. "Le pays n'a pas le choix, l'urgence est de stopper les attaques spéculatives sur le forint", explique Zsolt Darvas, économiste au centre Bruegel.

Pour les pays les plus fragiles la situation devient explosive. Pour se renflouer les gouvernements doivent émettre des titres de dettes sur le marché. Mais les acheteurs ne se pressent pas, considérant les obligations de pays émergents comme des "junk bonds", des obligations pourries. Autrement dit, ils redoutent que ces pays ne fassent faillite et d'avoir sur les bras une version moderne des redoutables "emprunts Russes".

Les pays les moins endettés, ceux qui ont accumulé grâce à leur commerce extérieur, leur manne pétrolière ou leurs ressources en matières premières ont assez de réserves de changes et ont de quoi tenir quelques années. Ceux qui se sont endettés en monnaie locale comme l'Argentine peuvent, dans une certaine mesure "faire marcher la planche à billet" pour se financer. Mais les autres n'ont d'autres choix que d'appeler à l'aide internationale.

Le FMI dispose d'une enveloppe de 200 milliards de dollars pour aider ces pays. Certains redoutent que cela ne suffise pas. La crise n'est pas finie et la liste des Etats en danger risque de s'allonger. "De plus en plus d'économies sont en état de survie il faut renforcer d'urgence les moyens du FMI", juge ainsi Olivier Pastré, professeur à Paris-VIII.

Claire Gatinois et Yves Mamou
Article paru dans l'édition du 24.10.08