mardi, mars 21, 2006

Maroc-USA : l’accord de libre-échange, un ensemble d’opportunités

Une cinquantaine d’hommes d’affaires marocains installés aux Etats-Unis sont venus participer deux jours durant au Technopark de Casablanca à des rencontres organisées par la Moroccan American Circle (MAC) et l’Association of Moroccan Professionals in America (AMPA).

PHOTO: Mouslime Kabbaj, président de la "Moroccan American Circle".

Une cinquantaine d’hommes d’affaires marocains installés aux Etats-Unis sont venus participer deux jours durant au Technopark de Casablanca à des rencontres organisées par la Moroccan American Circle (MAC) et l’Association of Moroccan Professionals in America (AMPA). Entretien avec Mouslime Kabbaj, président de la MAC.

Menara : Vous avez organisé deux jours de rencontre avec nos compatriotes investisseurs aux Etats-Unis. Quels sont les objectifs de ce colloque ?
Slim Kabbaj : Cette rencontre avait pour objectif de mettre en relation les entrepreneurs marocains, qui se reconnaissent comme étant des entrepreneurs à succès. Ils ont des entreprises qui ont réussies avec un chiffre d’affaires significatif. Ils ont créé l’AMPA, l’association des professionnels marocains aux Etats-Unis. Ils ont organisé ces deux jours de rencontre avec nous sur le thème : « Le pouvoir du partenariat : les ponts maroco-américains ».
Il s’agit d’une rencontre entre hommes d’affaires et entrepreneurs sur des thèmes précis. Nous avons voulu être d’abord précis avant d’être généraliste. Nous avons abordé les domaines de la banque et de la finance, la biotechnologie et la médecine, les nouvelles technologies et les télécommunications. Nous avons également une table ronde sur les opportunités de l’accord de libre-échange.

A travers ces thèmes, nous avons voulu faire connecter des gens dans ces secteurs spécialisés qui veulent faire du business. Nous avons souhaité bien évidemment que ces gens signent des contrats, aillent jusqu’au bout de ces rencontres, mais pour un certain nombre d’entre eux, les contacts ont été établis et on verra bien ce que cela va donner. Parmi les intervenants, nous avons réuni les grands leaders dans chaque secteur. Nous avons ainsi un débat sur la biotechnologie auquel participe M. Farid Bennis, le patron de Lapropha, numéro 1 au Maroc dans le domaine du laboratoire. Dans le domaine de la banque, Ittijari Wafabank et le Fonds Sindibad étaient représentés.

Menara : Comment expliquez-vous cette Success story des entrepreneurs marocains aux Etats-Unis ?
Slim Kabbaj : Les Marocains vont aux Etats-Unis depuis longtemps. Mais, depuis une quinzaine d’années, beaucoup de jeunes marocains y sont allés étudier. Ils y sont restés ! Ce sont des jeunes dynamiques, pro actifs et qui ont le tempérament du business à l’américaine ! Contrairement peut être aux Marocains qui y sont allés dans les années 70 et qui avaient étudié en Europe et qui étaient plus dans la philosophie, l’idéologie et le social.

Les Marocains actuellement installés aux Etats-Unis ont la fibre entrepreunariale et recherchent le succès. D’ailleurs, lorsqu’on les entend parler, c’est chiffre d’affaires à l’appui, c’est contrat de combien de millions de dollars…c’est très concret ! C’est très pragmatique ! Il y a donc le bon côté des choses : ces gens là sont pragmatiques et cherchent à faire du business.
D’un autre côté, pour un pays en développement, cela peut apparaître trop agressif. Une association comme la notre a donc tendance à faire le pont mais aussi le tampon, l’amortisseur, pour que les choses se passent bien ! (Rires)

Menara : Si demain, un investisseur marocain est tenté par le marché américain, quels conseils vous lui donneriez ?
Slim Kabbaj : Vous faîtes bien de spécifier la direction Maroc Etats-Unis car l’accord de libre échange institue un accord juridique dans les deux sens. S’il y a un conseil à donner dans les deux sens, c’est tout d’abord de connaître très rapidement les cultures. Nous n’avons pas nécessairement les mêmes cultures de business, les mêmes objectifs, ni la même rapidité avec laquelle on veut gagner de l’argent.
Ces jeunes générations de Marocains installés aux Etats-Unis sont plus proches de la mentalité américaine, mais au Maroc il y en a beaucoup qui en sont loin ! Il y a donc une certaine crainte, une appréhension, notamment des Marocains ici de dire : « le marché américain est trop gros ! Les chiffres dont nous parlons sont énormes et nous allons être avalés ».

En fait, nous allons être avalés si nous ne faisons rien ! Les accords de l’OMC, l’Organisation Mondiale du Commerce, libèrent déjà un certain nombre de produits et d’obstacles douaniers. Nous allons allés vers de plus en plus d’ouvertures et de besoins de compétitivité. L’accord de libre échange est plus un ensemble d’opportunités qu’il faut saisir.
En connaissant les cultures, en montant des partenariats avec des gens qui sont sur place, des Marocains, cela peut aider.

Ensuite, il faut connaître les besoins là bas. La meilleure façon de le faire, c’est de se mettre dans les niches. Il faut trouver des niches sur des produits qui nous intéressent nous, en tant que Marocains, là où nous sommes très compétitifs, soit parce que nous sommes les seuls, soit parce que nous avons une grande valeur ajoutée. Je pense, par exemple, à l’huile d’Argan, l’huile d’olives. Aujourd’hui, ces jeunes Marocains établis aux Etats-Unis ont les dents longues. Ils savent survivre dans la jungle et il faut les soutenir !

Karim Dronet

A Mexico, un Forum mondial pour l'eau

A Mexico, un Forum mondial pour l'eau

A l'image de la planète, la capitale mexicaine est mal approvisionnée en eau. Pendant une semaine, ONG, institutions internationales et représentants locaux vont essayer de trouver les moyens d'améliorer le sort du milliard de personnes qui n'a pas accès à l'eau potable.

par Babette Stern
LIBERATION.FR : jeudi 16 mars 2006 - 15:42

Mexico, de notre correspondante
Après Marrakech, La Haye et Kyoto, c'est au tour de Mexico d'accueillir le 4ème Forum mondial de l'eau jeudi, et jusqu' au 22 mars. Il est peu probable que la capitale mexicaine ait obtenu l'organisation de cette manifestation, à laquelle sont attendus plus de 5000 participants, en raison de la bonne gestion de son eau. Depuis des années, la mégalopole se repose essentiellement sur la surexploitation des nappes phréatiques pour alimenter ses 22 millions d'habitants en eau, ce qui a provoqué de nombreux affaissements du sous-sol. Au cours du siècle dernier, Mexico s'est enfoncé de 10 mètres. Certains quartiers s'enfoncent de un mètre par an. Et l'eau ne coule pas pour autant dans tous les foyers. Loin de là. L'approvisionnement fait défaut, le recyclage des eaux usées est quasi-inexistant, l'absence d'entretien des canalisations fait que près de 50% de l'eau se perd dans le sous-sol. Et les «chilangos» (habitants de Mexico) «oublient» les trois quart du temps de payer leur facture.
En fait, Mexico concentre, en une seule ville, l'ensemble des problèmes que vont aborder pendant sept jours représentants d'Etat et de collectivités locales, institutions internationales, experts, professionnels et ONG de 55 pays autour du thème «des actions locales pour un défi mondial». En toile de fond de cette réunion, l'engagement des pays membres des Nations Unies de réduire de moitié d'ici 2015 le nombre de personnes n'ayant pas accès à l'eau potable: plus d'un milliard sont dans ce cas à l'échelle planétaire.
Pour relever ce défi, l'une des pistes est la décentralisation qui donnerait aux collectivités locales une plus grande maîtrise de la gestion de leur eau. Elle peut se heurter parfois à des problèmes de calendrier: au Mexique par exemple, les maires sont élus pour un mandat de trois ans non renouvelable, une période trop courte pour qu'ils tirent un bénéfice d'installations réalisées sur le moyen terme. L'autre piste est le partenariat public privé (PPP), fortement conseillé par les institutions multilatérales comme la Banque mondiale, Les PPP permettent de compenser les restrictions budgétaires des Etats et met à la disposition des gouvernements et des collectivités locales l'expertise des entreprises spécialisées dans la gestion de l'eau. De nombreuses organisations non gouvernementales y voient une privatisation partielle des ressources en eau, et défendent, à l'instar de Danielle Mitterrand «que l'eau n'est pas une marchandise mais un bien public». Parallèlement à l'événement officiel, les ONG tiendront un forum alternatif, au cours duquel le Tribunal latinoaméricain de l'eau, instance indépendante sans réelle valeur juridique, examinera 13 cas situés en Amérique latine violant «le droit fondamental de tout individu à l'eau».
Selon les organisateurs du Forum, les Etats-Unis envoient la délégation la plus importante (391 participants). La délégation française, conduite par la ministre de l'environnement, Nelly Olin, compte 309 personnes parmi lesquelles de nombreux élus. Viennent ensuite le Japon (252), l'Inde (181), les Pays-Bas (175) et le Nigéria (151). Bien que le Forum est une dominante politique et non commerciale, les entreprises seront également présentes. Au premier rang desquelles le groupe Suez et Veolia.

PPP pour l'eau

Forum mondial de l’eau
« 1 habitant sur 5 n’a pas accès à l’eau »

C’est à Mexico que se tient le 4e Forum mondial de l’eau. « 5000 personnes, composées de représentants d’Etat et de grandes villes, d’experts, de professionnels publics et privés, ainsi que d’ONG dont 200 au moins tiendront un forum informel hors de l’enceinte officielle », seront réunies entre le 17 et le 22 mars.


« Le coup d’envoi du forum a été donné officiellement jeudi à la mi-journée par le président mexicain Vicente Fox », précise l’APS. La conférence ministérielle, prévue les 21 et 22 mars, devra regrouper quelque 130 ministres de l’Eau et de l’Environnement. L’objectif principal de ces forums consiste à drainer les fonds publics mondiaux vers les entreprises privées de l’eau. Le Conseil mondial de l’eau (ONG), promoteur et initiateur de ces rendez-vous, préconise l’investissement « de 100 milliards de dollars par an dans le secteur de l’eau ». Face à la difficulté de capter les nations pour l’aide à ce type d’investissement, une formule est retenue et consiste, depuis le forum de Kyoto, à promouvoir la pénétration d’entreprises privées dans le monde. Le modèle français, Partenariat public privé (PPP), envisagé pour l’eau consiste à « créer un environnement propice à la participation du secteur privé pour la réalisation des infrastructures par le secteur public. Les collectivités locales sont invitées à financer les infrastructures, quitte à s’endetter pour le faire, et à en confier l’exploitation au privé. Les Etats faisant appel au privé doivent garantir aux investisseurs la pérennité des contrats (et des bénéfices qui vont avec, quelle que soit l’évolution de l’économie du pays). Le FMI et la Banque mondiale sont invités à soutenir cette politique. En particulier en ne finançant que les projets répondant aux critères du Partenariat Public Privé », précise le rapport du Conseil mondial de l’eau. Par ailleurs, l’Unesco rappelle, dans son 2e rapport mondial des Nations unies, que « les ressources en eau douce sont loin de manquer sur notre planète. Pourtant, du fait de la mauvaise gestion, du peu de moyens disponibles et des changements environnementaux, quasiment un habitant de la planète sur cinq n’a toujours pas accès à l’eau potable et 40% de la population mondiale ne disposent pas d’un service d’assainissement de base ». A ce titre, le Forum mondial de l’eau, par la réunion des secteurs publics et privés, des professionnels et des politiques, est l’occasion d’échanger et d’établir une stratégie commune. « Le Mexique est un pays quasi désertique, particulièrement les régions du Centre et du Nord, alors que toute la partie Sud dispose de grandes quantités d’eau, parfois d’ailleurs plus qu’il n’en faudrait », explique le président Vicente Fox. « Cela nous place dans une position privilégiée pour mieux comprendre le problème de l’eau sous ses différents aspects, et a ainsi conduit notre administration à considérer l’eau comme une priorité nationale », conclut-il.

« De véritables partenariats Nord-Sud »

Entretien avec Jean-Luc Touly, président de l’Association pour un contrat mondial de l’eau.

Un habitant sur cinq n’a toujours pas accès à l’eau potable

sur la planète. Quels sont les freins à de réels progrès dans ce domaine ?

Jean-Luc Touly.

Il manque une grande structure internationale sur

le sujet, affiliée à l’ONU, avec un véritable pouvoir. Avec

le Conseil mondial de l’eau, on en reste aux seules déclarations d’intentions.

Du coup, les objectifs

du millénaire, comme ceux formulés à Kyoto en 2003,

ne sont pas suivis d’effet.

La catastrophe annoncée

se confirme, même si la sensibilisation progresse. Le financement, on le sait, doit

se faire des pays riches vers les pays pauvres. Et là, il manque une volonté politique.

Vous réclamez un retour

à la gestion publique

de l’eau dans les pays développés. Ce schéma

est-il applicable aux pays en développement,

qui doivent construire

ou perfectionner leurs réseaux ?

Jean-Luc Touly. Oui. Regardez l’Amérique latine. Des peuples, des mouvements sociaux se lèvent pour refuser ce système néocolonial qui voit les ressources naturelles contrôlées, exploitées par les grandes multinationales de l’eau, qui sont, je le rappelle, presque toutes d’origine française. Des pays comme

la Bolivie, depuis la victoire d’Evo Morales, mettent

en oeuvre des solutions alternatives, qui ne sont pas toujours le retour pur et simple à la régie publique : création de coopératives ou encore mise en place d’un véritable contrôle social des entreprises publiques, destiné à éviter les abus. Les multinationales elles-mêmes revoient leurs stratégies

et quittent certains pays, comme Suez en Argentine, se redéployant dans de nouveaux marchés jugés plus sûrs, comme la Chine

par exemple. Mali, Gabon, Afrique du Sud, Inde, Philippines... Les exemples d’échecs du partenariat public-privé sont nombreux. C’est donc vers des partenariats « public-public », des collectivités des pays riches vers les pays pauvres, qu’il faut se tourner. Ce que permet la loi Oudin-Santini, adoptée en février 2005,

qui ouvre le droit d’utiliser jusqu’à 1 % des ressources issues de la gestion de l’eau pour des actions de solidarité. L’idée est bonne. Sauf

que les multinationales,

les agriculteurs et les industriels ne participent pas directement à cet effort.

Quelles sont les autres solutions concrètes

à mettre en oeuvre pour améliorer l’accès à l’eau

de tous ?

Jean-Luc Touly. Il y a des solutions techniques, peu coûteuses : récupération

des eaux pluviales, recyclage des eaux usées, récupération de l’humidité dans l’air... Mais il faut aussi

un électrochoc pour que la communauté internationale se mobilise. C’est pourquoi nous plaidons pour le prélèvement de 1 % du budget militaire mondial, soit à peu près 10 milliards de dollars, afin de financer l’accès à l’eau de tous. Seconde proposition : un prélèvement de 1 %

du chiffre d’affaires

des multinationales de l’eau en bouteille (Danone, Nestlé, Coca-Cola), qui s’accaparent des grandes nappes phréatiques au Brésil,

en Afrique ou en Inde.

Roger Lenglet, Jean-Luc Touly, l’Eau des multinationales.

Les vérités inavouables, Fayard, 2006, 250 pages, 19 euros.

Entretien réalisé par Alexandre Fache

Réflexions sur les mutations du droit international

par Hugo Ruiz Diaz Balbuena, Mireille Mendès-France

Première partie : Le droit international et la mondialisation

A. Le retour vers le futur ?

1. La crise du droit international et le nouvel ordre néo- colonial

Les mutations du droit international : Un droit uniforme, unidirectionnel et impérialiste

Depuis la deuxième guerre mondiale, la société internationale et les relations internationales étaient de facto façonnées par des rapports de forces plus ou moins équilibrés entre le bloc socialiste et le bloc capitaliste. Dans cette période, l’une des caractéristiques du droit international était sa nature hétérogène et relativement pluraliste, essentiellement dans la période où le poids des nouveaux Etats indépendants commençait à peser sur la balance des relations internationales. Droit à la nationalisation, droit à l’expropriation, droit des peuples sur leurs ressources naturelles, contrôle des activités des firmes transnationales, contrôle des capitaux et du transfert des capitaux, droit au développement, nouvel ordre économique international, étaient parmi d’autres, autant de composants qui caractérisaient les rapports internationaux et la régulation juridique de l’époque. Lors de la disparition du bloc socialiste et après des changements substantiels, des changements de fond concernant la régulation juridique et politique internationale se sont produits : le droit international construit après la deuxième guerre mondiale connaît une dégradation généralisée et, celle- ci a des répercussions directes sur le droit interne des Etats, spécialement sur ce qui touche à l’exercice des compétences des pouvoirs publics. Ce changement est encore plus visible sur l’Etat, formellement, sujet privilégié des relations internationales. Si dans la période allant des années 70-80, le rôle de l’Etat en tant que régulateur des rapports sociaux était revendiqué ouvertement , de nos jours le rôle social de l’Etat se trouve profondément érodé par l’offensive idéologique et politique du capitalisme.

Cette offensive a comme conséquence un vrai recul des fonctions de l’Etat sur le plan de l’exercice traditionnel de ses compétences. Le rôle des pouvoirs publics se réduit à réguler juridiquement les privatisations et la vente des biens publics aux transnationales (entreprises d’Etat rentables), à gérer les « restructurations » qui entraînent le licenciement des employés et ouvriers, etc. Les pouvoirs publics perdent ainsi la maîtrise des politiques économiques, sociales et financières. Notamment, en tant que facteur politique et social de régulation, l’Etat a perdu et son rôle de redistributeur de richesses par la politique fiscale et celui de la mise en place des politiques d’emploi... En un mot, l’Etat est réduit au rôle de gardien des intérêts privés. Et le pouvoir politique, enfoncé dans une profonde crise de crédibilité et de légitimité, est le facteur qui véhicule « les valeurs » du capitalisme et les mots d’ordre l’accompagnant : compétitivité, récompense au mérite, responsabilité individuelle, la soit disant égalité des chances et surtout la bonne gouvernance, dont le résultat pratique est l’accaparement de la richesse par une minorité.

L’ordre international n’est pas étranger à la restructuration du rôle de l’Etat et des pouvoirs publics. Sur le plan politique des relations internationales, la dégradation s’est encore accrue en effet, les rapports sociaux internationaux et les relations internationales sont façonnés par une structure unipolaire caractérisée par le rôle dominant des Etats-Unis. La prééminence et la domination nord-américaines sont bien reflétées par la stratégie actuelle consistant dans le refus obstiné d’encadrer leurs actions impériales dans la légalité internationale. Cette stratégie a des conséquences directes sur tout le système de sécurité collective construite après la deuxième guerre mondiale, mais aussi sur les règles du droit international en tant que système de régulation des rapports sociaux internationaux.

Si les Etats-Unis deviennent dans ce processus de déstructuration du « droit ancien » l’acteur étatique principal des relations internationales, leurs alliés et leurs satellites européens y participent activement dans la restauration d’un ordre mondial que l’on croyait disparu à jamais et définitivement enterré par l’histoire. C’est ainsi que sur la scène internationale revient avec force la notion très controversée d’Etats « civilisés » (de nature occidentale et porteuse d’ordres) face à des Etats et des peuples dits « non civilisés » ne pouvant bénéficier de la protection du droit en général et du droit international en particulier. C’est un vrai retour vers le futur, retour vers le droit international dans ses sources originaires qui a dominé la scène internationale jusqu’à la moitié du 20é siècle, un système de droit essentiellement occidental et néo-colonial. Dans ce cadre, les Etats-Unis et leurs alliés n’ont pas hésité à faire appel à des institutions de nature coloniale, telle l’occupation des territoires d’Etats souverains par le biais du régime de tutelle consacré par la Charte des Nations Unies à un moment où plus de la moitié des peuples de la planète était encore soumis à la domination coloniale occidentalo-européenne ; du Kosovo à la Bosnie, en passant par l’Afghanistan et l’Irak. Ce régime de tutelle renvoie au système de protectorat et de mandat mis en place par la Société des Nations entre les deux guerres !

2. La remise en cause de l’interdiction du recours à la force et des Nations Unies

Là, où l’ordre néo-colonial a été le plus frappant politiquement concerne l’érosion du système de sécurité collective, notamment par les tentatives d’abolition de facto de l’interdiction générale du recours à la force consacrée par l’article 2 § 4 de la Charte des Nations Unies : opération militaire "Renard du désert" (décembre 1998) contre l’Irak sans autorisation du Conseil de sécurité, agression contre l’Afghanistan et mise en place d’un gouvernement satellite, agression de l’OTAN au Kosovo sans base légale et sans mandat des Nations Unies, guerre d’agression contre l’Irak et de nouveau installation d’un gouvernement satellite... voici des initiatives visant la restructuration des relations internationales contemporaines par l’exercice de la violence. Cette violence n’est pas à l’écart du contexte du processus de mondialisation : elle fait partie d’une offensive générale déclenchée contre les droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, contre les droits humains. En d’autres mots, contre les acquis démocratiques et contre l’ordre international dans son ensemble. Ces actes d’une gravité spéciale ont particulièrement érodé la disposition de l’article 2 § 4 de la Charte des Nations Unies, universellement reconnue comme étant une norme impérative du droit international contemporain. Ces violations de l’interdiction du recours à la force remettent en cause non seulement une norme impérative du droit international, mais encore, ébranlent tout le système de sécurité collective. C’est le retour au jus ad bellum des temps anciens (droit de faire la guerre), logiquement le « droit » de l’exercice de la violence des plus forts contre les peuples les plus faibles. Il est utile de rappeler que l’interdiction générale du recours à la force consacrée par l’article 2 § 4 ne peut subir que deux exceptions : a. par décision du Conseil de sécurité en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationales (art. 24 et chapitre VII de la Charte) et, b. le recours à la force dans l’exercice de la légitime défense dans le cas où un Etat serait l’objet d’une agression armée (art. 51 de la Charte).

En dehors ce ces deux exceptions, le recours à la force constitue un acte d’agression suivant la Résolution 3314 du 14 décembre 1974. Aucune autre exception, même la soi-disant « intervention militaire humanitaire », n’est admise par le droit international. Et rappelons-le, l’acte d’agression est un crime international punissable par le droit international. Constatons ainsi que bien que le droit international interdit l’emploi ou la menace de l’emploi de la force, la violence des puissants n’a plus de paramètres de régulation juridique moins encore de limites politiques : ils partent, au nom d’une nouvelle civilisation, comme jadis l’invasion européenne des terres américaines, dans une croisade qui cache mal les politiques et les visées de soumission des peuples et d’appropriation des ressources communes. Et paradoxalement, l’ONU qui devrait être l’élément de contention et de régulation juridique de la violence, participe dans cette croisade de conquête du monde par les sociétés transnationales. Restructuration ou Réforme de l’ONU ( voir n°III) ? Désordre mondial, anarchie, déchaînement de la violence, crise de légitimité, crise de légalité, crise de gouvernabilité mondiale, crise institutionnelle, crise démocratique, voici les principales caractéristiques de la société internationale. Cet ordre international néo-colonial basé sur la violence est symétrique à l’ordre économique et social de misère construit exclusivement au nom et au profit des intérêts privés.

3. Les mutations dans l’ordre économique

Le droit international de nature économique est sans conteste , le corpus juridique qui reflète le mieux les mutations de l’ordre politico-juridique du monde. Sa principale caractéristique sur le plan juridique est la confusion et la fusion du droit avec les intérêts des marchands. C’est Leur droit. C’est l’imposition du droit commercial au sens strict du terme : les ressources naturelles, les microorganismes, les écosystèmes, le corps humain, la santé, l’éducation, la culture, la recherche scientifique, les médicaments, la production des biens sont tous soumis à la loi du marché et font l’objet d’appropriation « légale » par les firmes privées et par les grandes corporations transnationales. Les institutions multilatérales d’ordre économique (FMI/BM/OMC), leurs tribunaux (ORD, CIRDI) ainsi que les pouvoirs de facto (G8, Club de Paris...) constituent le fer de lance de ce nouvel ordre économique international. Tous les peuples sont donc soumis à des règles juridiques où les grandes mutations du droit international ont été déterminées par le changement substantiel des rapports réels entre les principaux acteurs de l’histoire et, ce changement est, à son tour, déterminé par la nature des acteurs en présence. Certainement, la violence joue un rôle de premier niveau dans le processus de mutation de l’ordre économique mondial.

Conclusion. Le saut irréversible vers le futur ?

Rien n’est moins sûr. L’histoire ne se répète pas, elle n’est pas cyclique non plus. Les grands bouleversements du droit international ont obéi historiquement à l’action des forces en présence : leurs contradictions, leurs disputes hégémoniques pour la direction du monde. Ainsi que l’a remarqué Charles Chaumont « ... le droit international est fondé sur des contradictions.... » , et ses règles sont basées sur des facteurs idéologiques qui cachent les réalités de la puissance des plus forts sur les plus faibles . Aujourd’hui, nous assistons à un changement qualitatif des rapports sociaux internationaux, à un bouleversement des rapports de forces et de tout le système juridique international qui en découle. Il s’agit de changements de fond de l’ordre politico-juridique international, caractérisés par la violence comme élément de légitimation dans le processus de formation de nouvelles règles. Répétons- le : ces changements sont le résultat des variations qualitatives des rapports de force réels et des contradictions entre les acteurs de l’histoire. Mais en même temps les dominés ont commencé à s’emparer du droit international et de la politique internationale pour tenter d’en faire un instrument de transformation, comme jadis l’ont fait les peuples luttant pour leur libération contre la domination coloniale.
Deuxième partie : Les Institutions financières et commerciales internationales : réforme ou restructuration ?

1. Un peu d’histoire

Pour instaurer la sécurité et la coopération économique dans le monde de l’après-guerre, la solution proposée lors de la Conférence monétaire et financière des Nations Unies tenue à Bretton Woods consistait à créer un ensemble d’institutions intergouvernementales qui auraient pour mission de surveiller les négociations et la coordination multilatérales de politiques susceptibles de parer à toutes les menaces qui paraissaient compromettre la survie du nouveau système commercial et financier multilatéral. Ces institutions devaient comprendre notamment :

- a. Le Fonds monétaire international (FMI), chargé de garantir un système multilatéral des paiements cohérent, reposant sur des taux de change négociés multilatéralement, stables mais ajustables, dans des conditions qui limitaient strictement les flux de capitaux internationaux privés.

- b. L’Organisation internationale du commerce (OIC), qui aurait pour mission de fournir un cadre basé sur des règles pour faciliter la réduction des obstacles commerciaux dans le cadre de négociations multilatérales, et de coordonner les politiques économiques nationales afin de porter la demande mondiale et l’emploi à des niveaux suffisants pour soutenir le développement des pays membres à faible revenu.

- c. Le Fonds de stabilisation international des produits de base, qui devait assurer la stabilité des prix des matières premières et des produits de base grâce à la création de stocks régulateurs.

La conception de ces institutions reposait sur le caractère inséparable des objectifs nationaux et internationaux. L’importance attachée à l’existence d’un environnement extérieur favorable pour pouvoir bénéficier d’une croissance rapide et du plein emploi se reflète dans l’énoncé des objectifs du FMI, qui étaient de "faciliter l’expansion et l’accroissement harmonieux du commerce international et de contribuer ainsi au maintien de niveaux élevés d’emploi et de revenu réel, ainsi qu’au développement des ressources productives de tous les membres en tant qu’objectifs fondamentaux de la politique économique". La Charte de l’OIC (Chapitre 2, article II) était encore plus explicite : "Les États membres reconnaissent qu’il n’est pas uniquement de leur intérêt national de prévenir le chômage et le sous-emploi en assurant et en maintenant dans chaque pays des possibilités d’emploi productif en faveur des personnes aptes au travail et désireuses de s’employer ainsi qu’un volume important et en progression constante de la production et de la demande effective de biens et de services. Ils reconnaissent que la prévention du chômage et du sous-emploi est également une condition nécessaire pour atteindre ... le développement des échanges internationaux, et, par conséquent, pour assurer le bien-être de tous les autres pays". Les efforts déployés pour mettre en place un ensemble cohérent et coordonné d’institutions internationales pour promouvoir le plein emploi, libre-échange équitable et le développement n’ont jamais été achevés. Seul le FMI et la BM furent créés, et le système des négociations fondé sur les règles pour éliminer les accords bilatéraux discriminatoires via l’application de la clause inconditionnelle de la nation la plus favorisée est le seul élément qui ait survécu à la Charte de l’OIC sous la forme de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT, 1947).

Lors des débats qui devaient déboucher sur Bretton Woods, une autre institution a été ajoutée à l’ensemble initial : la Banque internationale pour la reconstruction et le développement destinée entre autres, à "promouvoir la croissance équilibrée à long terme des échanges internationaux et maintenir l’équilibre des balances des paiements en encourageant l’investissement international pour le développement de ressources productives des membres, et améliorer ainsi la productivité, les niveaux de vie et les conditions de travail dans les pays membres"( art. I, iii). Notons un point important : les problèmes spécifiques des pays en développement qui participaient à la mise en place du système commercial et financier international d’après-guerre n’ont pas été débattus à Bretton Woods.

Dés le départ, ces institutions de nature libérale ont eu deux handicaps :

- a. elles ont été mises en place par les pays riches. Les mécanismes de décision politique restent dans leurs mains et ils ont dés le début la mainmise sur le FMI et la BM, principalement les Etats-Unis.

- b. les intérêts des pays en voie de développement avaient été ignorés dés le début, ceux - ci étant d’emblée écartés du centre des décisions. Avec le temps, les pays en voie de développement et par extension leurs populations, subiront directement les effets des décisions prises par les centres de pouvoir localisés à l‘intérieur de deux institutions. Depuis le début de l’offensive néo-libérale des années 1980, l’édifice sur lequel reposaient les relations internationales a subi des modifications. Avec cette mutation, c’est tout le système juridico-politique internationale construit après la deuxième guerre mondiale (l’ONU, institutions spécialisées, organes subsidiaires, droits humains, droit au développement,....) qui est mis en question. Deux éléments peuvent être considérés comme facteurs du changement des rapports de forces et du droit international : a. l’échec et la faillite total du socialisme comme système alternatif au capitalisme, b. l’échec des pays du Sud dans la construction d’un Nouvel ordre international, et en conséquence, l’échec des politiques de développement élaborés à partir des besoins de ces pays.

Le système libéral, libéré des contraintes juridico-politico-idéologiques et des contradictions sur le plan international, se trouve aujourd’hui en position d’arbitre, en condition d’imposer à l’échelle planétaire son propre modèle en tant que moteur unique du fonctionnement de l’économie mondiale. En 1994, suite à l’Accord de Marrakech, l’OMC est crée comme organisation internationale dotée de compétences nécessaires et des capacités fonctionnelles. Elle complète le tripode des relations économiques et financières internationales aux côtés du FMI et de la Banque mondiale.

(...)

Notons que les débats sur la nécessité des réformer les institutions financières internationales ont déjà vu le jour et posés en tant que revendication par les pays en voie développement, dans le contexte de la construction du Nouvel ordre économique international.

2. Le FMI et la Banque mondiale : le pouvoir dans la société internationale, le processus d’imposition d’un modèle social régressif et de l’ordre international de la misère

En ce qui concerne les relations internationales, l’un des caractéristiques les plus frappant est le fait qu’un petit groupe d’Etats puissants et d’entreprises transnationales concentrent le pouvoir et prennent à huit clos, des décisions qui déterminent la vie et les conditions de vie des peuples. Dans la conjoncture actuelle et dans l’état des rapports de force, le fonctionnement de la société internationale et des sociétés humaines est largement déterminé par les « pouvoirs privés », étant fondé sur une logique marchande et de « marchandisation » de l’être humain et des populations entières de la planète. Les IFIs fonctionnent selon la logique des entreprises financières privées et du capitalisme mondial, sans grande considération des résultats sociaux et politiques de leurs actions et en constituent l’organe exécutif des pouvoirs de facto. La politique économique, financière et commercial internationale est un monopole des institutions internationales (FMI, BM, OMC) qui répondent essentiellement aux intérêts des pays développés : les institutions multilatérales agissent comme vecteurs de l’idéologie néolibéral : les institutions financières internationales sont des instruments qui imposent des politiques consistant à télécommander les économies des pays envoie de développement à travers l’imposition à des pays impuissants des politiques économiques impopulaires et antisociales , destinés à assurer le profit des banquiers privés, des pays créanciers et des grandes firmes transnationales.

De sa part, l’OMC est l’institution multilatérale dont les règles sont entièrement fondées sur la logique et les intérêts des pays du Nord et des sociétés transnationales : Accord sur le droit de propriété, AGCS, Accord sur l’agriculture...Logique et règles très simples : toutes les responsabilités incombent à l’Etat, aux pouvoirs publics et aux populations, tenus de respecter scrupuleusement les droits privés des transnationales, toute l’impunité assurée à ces dernières. Ces institutions multilatérales constituent le fer de lance du libéralisme et empêchent tout espoir de développement alternatif durable pour les pays du Sud. Elles font partie intégrale du processus d’imposition de un ordre international de misère et de violence en participant activement à la consolidation du système social international d’exclusion juridiquement organisée.

3. Les institutions multilatérales sont- elles réformables ?

Pour répondre à la question nous allons aborder deux points essentiels. Tout d’abord, la problématique de la dette en rapport avec les programmes d’ajustement structurel et ensuite une analyse politico-juridique des institutions multilatérales.

- Dette, programme d’ajustement structurel : la mainmise sur les ressources humaines et naturelles des peuples du Sud. A partir de 1982, au moment de la crise de la dette, c’est tout le système bancaire privé occidental qui été menacé d’une faillite en chaîne. L’entrée sur scène du FMI et de la BM a permis de gérer cette crise, à travers le rééchelonnement et les annulations partielles. La dette demeure cependant l’un des problèmes essentiels des pays en voie de développement et de leurs populations. La dette externe sert avant tout d’instrument de contrôle des économies des pays en voie de développement : le FMI et la BM imposent des programmes économiques, commerciales et financières qui dépassent largement le cadre de la simple imposition d’un ensemble de mesures macroéconomiques au niveau interne. Leurs politiques s’insèrent dans le processus de démantèlement du rôle social de l’Etat, faisant partie intégrale d’un projet politique, d’une stratégie délibérée de transformation sociale à l’échelle mondiale, dont l’objectif principal est de faire de la planète un champ d’action où les sociétés transnationales pourront opérer en toute sécurité et en toute impunité. « Les programmes d’ajustement structurel (PAS) jouent ainsi un rôle de "courroie de transmission" pour faciliter le processus de mondialisation qui passe par la libéralisation, la déréglementation et la réduction du rôle de l’État dans le développement national. A juste titre nous pouvons dire que le FMI et la Banque mondiale jouent un rôle de premier plan du processus de formation et consolidation de l’ordre néolibéral. A travers l’imposition de leurs programmes d’ajustement, elles sont à l’origine de politiques sociales catastrophiques pour les populations : privatisation de la santé, privatisation de l’éducation, privatisation des services publics, libéralisation forcée du commerce, tout cela en parfaite concordance avec la politique commerciale et les règles libérales de l’OMC.

Le FMI et la BM deviennent des institutions dont le but principal est, parmi autres, le recouvrement des intérêts de la dette, la soumission de chaque pays aux règles juridiques de la déréglementation assurant la libéralisation des mouvements des capitaux, la démission des pouvoirs publics de tout contrôle démocratique de l’économie nationale. Avec l’OMC elles sont, en substance, les gardiens institutionnels des intérêts privés et les piliers politico-juridiques du système libéral mondial. C’est la nouvelle forme de colonialisme : la domination des puissants se manifeste et se cache derrière la prise de décision au sein d’organismes multilatéraux économiques, financiers et commerciaux. Voici « ...l’impérialisme « triangulaire » moderne ».

- La question du pouvoir à l’intérieur des institutions multilatérales. La parcelle du droit.

Il faut constater d’emblée que le FMI et la BM sont des institutions internationales multilatérales reliées aux Nations Unies. En tant que telles, elles sont, en principe, tenues d’ajuster leur conduite aux principes, buts et règles de la Charte des Nations Unies. Loin de là, leurs activités sont allées plutôt en sens inverse : à l’encontre et contre le droit international et de la Charte des Nations Unies. Aucun contrôle démocratique, aucune participation ouverte, aucune légitimité démocratique, aucune règle autre que la logique marchande et la force, camouflés par le droit interne : voici les composants essentiels de base du fonctionnement du FMI et de la BM. En ce qui concerne la procédure de prise de décision au sein du FMI et de la BM, elles se trouvent concentrées aux mains des puissants, rassurant juridiquement l’exercice du pouvoir et de l’hégémonie des plus forts. En effet, comme le remarque Chemillier -Gendrau, ces institutions « ..sont de purs relais du rapport de forces... » et aucun ordre mondial, aucune légalité internationale, aucune norme impérative n’a encore réussi à y pénétrer.

Au sein de ces institutions le rôle prépondérant revient, tout naturellement, aux pays industrialisés occidentaux, qui de facto, détiennent tout le pouvoir de décision, puisque le poids dépend entièrement du montant du capital souscrit. Leurs statuts consacrent et légalisent des relations économiques et financières internationales fondées sur la domination des plus forts sur les plus faibles.

- Légitimité, démocratie, respect du droit international ? La Résolution 36/172 qualifie l’apartheid comme un crime contre l’humanité. Egalement, l’AG de la ONU condamne fermement les sociétés transnationales et les institutions financières qui collaborent avec le régime raciste de l’Afrique du sud, en ouverte allusion au FMI et à la BM. En 1982 l’AG de l’ONU a demandé explicitement au FMI, dans le cadre de lutte contre la discrimination raciale et le racisme, de s’abstenir d’accorder toute assistance ou appui économique et financier au régime criminel de l’apartheid . La réponse du FMI a été d’une clarté surprenante et d’un cynisme brutal : il (le FMI) ne peut suivre l’injonction de l’AG de l’ONU parce que les demandes d’assistance économique et financière de l’Afrique du Sud étaient conformes à leurs statuts ... sans commentaires ! ! !. Une telle décision n’aurait vraisemblablement été prise sans l’accord implicite ou explicite des pays occidentaux, en particulier sans le concours des Etats-Unis qui a aussi été condamné explicitement par l’AG par leur appui ouvert au régime raciste de l’Afrique du sud.

- Respect des droits humains, de l’environnement des valeurs démocratiques et sociales ? Afin de laver leur image et légitimer leurs politiques anti- démocratiques, destructrices des biens publics, anti- environnementales et antisociales, ces institutions tentent de les cacher sous de phraséologiques vides de contenu. Dès lors, la modalité de l’application des programmes d’ajustement structurel - appropriation des biens publics par les sociétés transnationales et le secteur privé, bradage des secteurs rentables des services publics, privatisation de la santé publique, etc. - s’adapte aux critiques et prétend donner un « visage humain » au pillage des ressources et richesses des peuples du Sud. C’est ainsi que le FMI et la BM, dans un surprenant élan « démocratique », exigent la « participation de toutes les composantes de la société civile » dans le cadre de la « bonne gouvernance ». La bonne gouvernance implique que les pouvoirs publics devraient gérer l’Etat selon les critères du secteur privé, comme une entreprise, et non comme un bien public. La participation de la société civile n’est donc qu’un prétexte afin de garantir que la gestion des biens publics et des ressources des peuples, seraient menées selon les critères et les intérêts des pays du Nord et des sociétés transnationales. Rien de plus substantiellement opposé et en contradiction ouverte avec les valeurs et l’exercice des droits démocratiques. Plus encore, le rôle de la « société civile » ne signifie nullement que le FMI, la BM et leurs dirigeants et responsables vont se soumettre à un contrôle démocratique, à la volonté populaire ou aux règles de droit international. Sa participation n’implique pas non plus « le droit » d’exiger la mise en place des politiques sociales, environnementales et économiques respectueuses des droits humains et de l’environnement ou d’exiger des pouvoirs publics la récupération des richesses escamotées par les sociétés transnationales au domaine public. Il ne s’agit pas de décider le budget de la santé, de l’éducation ou du degré de la libéralisation du commerce.

En fait, l’objectif de ces institutions correspond parfaitement à une idéologie et vision instrumentalistes des mouvements sociaux et de la société civile. Cet « élan démocratique » du FMI et de la Banque Mondiale cherche plutôt à créer des garde-feu en prévision d’éventuelles poursuites judiciaires pour des violations graves des droits humains ou pour la destruction de l’environnement. N’oublions pas que les deux institutions ont donné leur appui inconditionnel au régime criminel de la dictature argentine qui a ordonné et exécuté les pires crimes contre l’humanité : tortures en grande échelle, violations massive des femmes, exécutions sommaires, trente mil disparus......Rappelons également d’autres cas exemplaires : l’appui au régime criminel de Pinochet au Chili, l’appui financier de la Banque Mondiale à Fujimori eu Pérou, l’appui constante à la dictature brésilienne, appui au régime criminel et corrompu de Souharto en Indonésie, etc..... Tous, des gouvernements sous protection des Etats-Unis. Mais la liste est très longue et les victimes innombrables.

Reprenons de nouveau la question centrale : le pouvoir. La procédure de décision et la décision restent, entièrement dans les mains des pays riches. Au FMI, cinquante pays africains dans son ensemble ont le même poids qu’un seul pays comme l’Allemagne ! Les Etats-Unis possèdent 18,34 pour cent des quotes-parts contre 17,8 pour cent des votes ce qui leur donne un pouvoir de veto de facto, un pouvoir de blocage sur toutes les décisions essentielles ou sur toute décision que leur soit défavorable, car les décisions importantes doivent être prises par une majorité de 85 pour cent. L’existence d’une Assemblée générale, où chaque membre est représenté peut donner à croire à une participation égalitaire. Mais son existence n’est qu’une formalité : les mécanismes de décision ne trouvent pas leur inspiration dans des valeurs démocratiques, mais du système censitaire. Les IFIs forment un club où « ....les riches ordonnent et les pauvres obéissent.. »

(...)

Conclusion : restructuration substantielle des institutions économiques multilatérales

Après cette brève analyse, un fait s’impose comme une évidence : le système des relations économiques, financières et commerciales internationales nécessite d’une re-formulation substantielle. Ce n’est pas par des réformes de façade (par ex. « visage humain » au PPTE) que ces institutions vont changer leurs politiques qui empêchent le développement des peuples du Sud. Ce n’est pas par des appels formels à la « participation de la société civile » qu’elles vont revoir leurs politiques destructrices de l’environnement et violations massives et graves des droits humains. Face à l’exclusion juridiquement organisée, face à cet ordre de misère, face aux politiques de déstructuration du droit des peuples et des droits humains, il est impératif de refonder un ordre international , basé sur la coopération internationale, le multilatéralisme et non sur la raison de la force et des intérêts privés.

Refonder l’ordre international qui a été imposé aux peuples « ... est inconcevable sans une restructuration radicale des systèmes financier, monétaire et commercial à l’échelle mondiale ». De là l’impératif que les institutions économiques multilatérales restent rattachées aux principes et règles du droit international, se soumettent aux obligations internationales en matière des droits humains et, surtout qu’elles restent soumises au cadre juridique onusien.
La troisième partie : L’ONU, réforme ou restructuration ?

1. La crise de légitimité et de légalité

Le Préambule de la Charte définit le rôle de l’ONU au regard de la proclamation suivante : Nous, peuples des Nations Unies, résolus à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances, à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international, à favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande, .. à unir nos forces pour maintenir la paix et la sécurité internationales, à accepter des principes et instituer des méthodes garantissant qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun, à recourir aux institutions internationales pour favoriser le progrès économique et social de tous les peuples,... De nos jours, tout le système multilatéral onusien subit une crise au plan de la légitimité, de la légalité des actes des organes et de leur crédibilité (Conseil de sécurité), de légitimation et de légalisation des guerres d’agression, des prises de position des responsables en faveur de la mondialisation libérale. Les grands absents sont les peuples qui subissent directement les effets sociaux catastrophiques de la mondialisation, principalement parce que les Nations Unies ont démissionné de leur obligation de garantir le développement économique et social.

La fin de la « guerre froide » et de l’affrontement entre le capitalisme et le socialisme aurait dû donner un rôle central aux Nations-Unies pour le développement et pour la paix dans le monde. Elle a échoué. Sur le plan du développement économique et social et de la coopération, ainsi que sur le plan des relations économiques, financières et commerciales internationales, l’ONU a également échoué. Sur le plan économique, l’OMC, le FMI et la Banque Mondiale - où les pays riches ont un rôle prépondérant - fixent eux-mêmes les règles de la mondialisation en dehors du cadre des principes et des règles inscrites dans la Charte et contre les normes régissant la protection internationale des droits humains. A cela, il faut ajouter le fait de l’influence de plus en plus envahissante des sociétés transnationales, qui se présentent comme composantes de la société civile mondiale travaillant en partenariat avec plusieurs organes de l’ONU. Ainsi, dernièrement, la firme Bayer est devenue le partenaire principal de Global Compact -dont le siège est à l’ONU- ; on peut se demander pourquoi cette transnationale pharmaceutique, à but privé, devient partenaire d’une organisation internationale dont le but est de veiller à l’intérêt commun de l’humanité ?

Depuis décembre 1991, les puissances occidentales, sous l’hégémonie et la direction des Etats-Unis, ont estimé qu’elles avaient les mains libres pour mettre à leur service les organes de l’ONU, particulièrement, le Conseil de sécurité. Cela avec l’objectif de créer de nouvelles formes institutionnelles de contrôle, de modifier radicalement les normes existantes pour les remplacer par des normes de nature régressive de type néo-colonial ( légalisation du droit d’intervention humanitaire, lutte contre le terrorisme, etc.). Ces transformations normatives constituent le complément nécessaire à l’expansion du modèle capitaliste et son implantation dans le monde entier comme seul et unique modèle possible. La militarisation, les actes d’agression, les “interventions humanitaires”, sont les composants essentiels de ce modèle. Le Conseil de sécurité de l’ONU devient, dès lors, avec le FMI, la BM et des regroupements de facto comme le G8 et le club de Paris, un “gouvernement mondial” entièrement entre les mains des Etats riches. C’est ainsi que l’ONU, par le biais du Conseil de sécurité, a légalisé des actes en violation de la propre Charte et du droit international coutumier. Le 12 juillet 2002 le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité la Résolution 1422, renouvelée en juin 2003 à travers la Résolution 1487. Dans ces résolutions, le Conseil de sécurité, s’alignant sur la volonté nord-américaine, a ordonné à la Cour Pénale Internationale de s’abstenir pendant une durée de 12 mois de toute investigation ou de procès contre les nationaux des Etats tiers au Traité de Rome de 1998 (Statuts de la Cour Pénale Internationale) sur des faits ou des omissions en rapport avec une mission ou une opération autorisée par les Nations Unies. De plus, le Conseil de sécurité s’arroge le droit de renouveler, à date anniversaire, cette Résolution. Selon l’article 16 des Statuts de la CPI, le Conseil de sécurité ne peut demander que la suspension des investigations en cours ; il ne peut ordonner à la Cour de s’abstenir d’initier des investigations sur des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre ou un génocide contre les nationaux d’un Etat tiers. Impunité ou immunité pour les responsables de crimes contre l’humanité ?

Plus que jamais la question de la réforme ou de la restructuration de l’ONU est à l’ordre du jour, cela se pose à l’échelle planétaire. L’urgence de procéder à une révision de fond concernant son fonctionnement s’est accentuée et aggravée avec les derniers actes des Etats-Unis, en complète violation du droit international et de la Charte. Unilatéralisme ou multilatéralisme ? La question paraît plus complexe. Rappelons simplement que les Etats-Unis et d’autres Etats occidentaux n’ont jamais renoncé à exercer la violence dans les relations internationales à côté et contre la Charte des Nations Unies. Citons parmi d’autres, l’invasion du Guatemala, 1954, l’invasion de Saint Domingue en 1960, l’invasion de Cuba en 1961, l’invasion de Panama 1989, l’invasion de Grenada 1983........ De la même manière, sous pression des Etats-Unis, les Etats membres du Conseil de sécurité ont agi en violation de plusieurs principes et règles fondamentales du droit international. Le 22 mai 2003, le Conseil de sécurité, avec vote affirmatif des 14 Etats membres présents à la réunion, a adopté la Resolution 1483, sur la base d’un projet présenté par les Etats-Unis, le royaume Uni et l’Espagne. Dans cette Résolution, les Nations Unies, • ordonnent la levée de l’embargo contre l’Irak • remettent l’économie irakienne et son futur politique entre les mains des forces envahissantes, en ouverte violation de la IV Convention de Genève (Section III, Titre III) • demandent aux occupants de travailler en faveur de la formation d’un gouvernement reconnu internationalement, sans fixer de calendrier pour le retrait des troupes d’agression....

Par le biais de cette Résolution, l’ONU reconnaît explicitement et légalement l’occupation sine die du territoire d’un pays membre indépendant, ainsi que la légalisation de l’appropriation par les envahisseurs des ressources naturelles de ce pays. Cet acte est une violation flagrante de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, des deux Pactes internationaux de 1966. L’Irak ne bénéficie même pas des dispositions contenues dans le Chapitre XII de la Charte concernant le Régime international d’ administration.

2. L’ONU au service des intérêts des pays dominants et de la mondialisation libérale ?

L’Assemblée générale de l’ONU, les gouvernements, les organes de l’ONU et les différentes organisations internationales se sont longtemps inquiétés des activités des transnationales. L’un des points du programme pour un Nouvel Ordre économique international faisait référence explicitement à la nécessité de contrôler leurs activités et de les soumettre à un contrôle institutionnel et au respect de l’ordre interne des Etats. Coup d’Etat au Guatemala en 1954 contre le gouvernement d’Arbenz, participation au coup d’Etat contre le gouvernement démocratique de Salvador Allende au Chili, appui au régime criminel de l’apartheid en Afrique du Sud. Ces participations à des actes illicites parlent des conduites illégales et des activités criminelles dont sont responsables les sociétés transnationales .

Les banques du Nord ont ainsi participé activement avec les IFIs au saccage de l’Argentine, en donnant leur appui inconditionnel au régime criminel de la Junte militaire qui avait planifié et ordonné l’éxécution de crimes contre l’humanité. Les sociétés transnationales ont historiquement constitué une menace pour l’autodétermination des peuples et pour la souveraineté des Etats. Elles ont même profité de la protection des pays du Nord qui les ont aidés militairement dans l’organisation d’actes d’agressions et de coups d’Etats contre les gouvernements démocratiques qui tentaient de les soumettre au respect de la loi et du droit international. Les activités des sociétés transnationales ne se limitent pas aux Etats : elles cherchent une légitimation par la voie de leur présence et de leur pouvoir au sein des organisations internationales afin de les influencer.

Ainsi, en 1978, l’organisation non gouvernementale « Déclaration de Berne », a publié un rapport sur L’infiltration des firmes multinationales dans les organisations des Nations Unies. Ce rapport expliquait, documents à l’appui, les activités déployées par ses sociétés pour influencer les décisions de plusieurs organes du système onusien. Mais maintenant, il ne s’agit plus d’infiltration, l’ONU a ouvert ses portes à ces sociétés en les appellant “ membres de la société civile” ou “ acteurs sociaux”, suivant la tendance mondiale de concentrer le pouvoir de décision entre les mains de grands conglomérats internationaux, au détriment de la démocratie, du droit au développement et du respect des droits humains.

Le partenariat de l’ONU avec les sociétés transnationales a été oficiellement proclamé à New York par le Secrétariat général à travers le Global Compact, le 25 juillet 2000. Parmi les participants de la “ société civile” apparaissent British Petroleum, Nike, Shell, Rio Tinto, Novartis, toutes avec un curriculum éloquent en matière de violations massives et graves des droits humains, du droit du travail et de destruction de l’environnement. Il faut citer également la Lyonnaise des Eaux, dont les agissements en matière de corruption de fonctionnaires publiques afin d’obtenir le monopole de la distribution d’eau sont bien connus en Argentine, en Bolivie, au Chili et ailleurs. Ce processus de partenariat avec les sociétés transnationales va à l’encontre des réformes démocratiques nécessaires au sein de l’ONU et renforce leurs politiques de mainmise sur les ressources et les biens publics appartenant aux peuples. Ce partenariat implique un virage stratégique de l’ONU qui confère de plus en plus de pouvoir de décision à ces sociétés privées. Le bien public se trouve escamoté au profit des intérêts privés, et l’ONU n’est pas étrangère à ce phénomène.

Nous pouvons dire que tout le système institutionnel de l’ONU est pris dans la tourmente de la mondialisation capitaliste. La question de la destruction des acquis sociaux, de la déstructuration du cadre juridique de la protection internationale des droits humains, l’utilisation de la force armée contre les peuples, la tendance généralisée du glissement vers des Etats de plus en plus autoritaires et répressifs, sont autant d’éléments qui doivent être lus à la lumière de ce processus de mondialisation. Et l’ONU joue un rôle de premier plan dans ce processus.

Conclusions

Il est nécessaire d’agir en vue de la reconstruction de l’ONU sur des bases démocratiques et respectueuses du droit international et des droits humains. Cette transformation ne passe pas uniquement par l’élargissement du nombre d’Etats au sein du Conseil de sécurité. Le problème de légitimité, à laquelle l’ONU est aujourd’hui confrontée, est beaucoup plus profond : il tient au fait qu’elle a démissionné de son obligation qui est d’assurer la paix et la sécurité internationales, essentiellement parce qu’elle elle a contribué décisivement à la violation des normes impératives du droit international et, surtout parce qu’elle joue le rôle de courroie de transmission d’un projet et d’un modèle politique, idéologique et économique qui vise à l’instauration d’un ordre international fondé sur la discrimination, la force, la domination des peuples et sur la violence. Démocratiser l’ONU, afin que « nous les peuples... » récupérions ce qui nous a été illégitimement pris par les puissances et par les transnationales, est un enjeu politique d’une extrême urgence. Et vu l’état très avancé de la dégradation de l’ONU, la grande question est de savoir s’il faut la transformer ou s’il faut la réformer.

Finalement, nous voulons avancer certaines pistes, qui ne pourront être effectives que si elles sont basées sur l’obligation de respecter le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et ce qui en découle en termes de droits fondamentaux (droits civils et politiques, droits économiques sociaux et culturels et droits environnementaux).

- 1. Renforcer les pouvoirs de l’Assemblée générale, qui doit devenir la seule instance universelle où tous les États - petits ou grands, riches ou pauvres- disposent d’une voix égale

2. Elargir les compétences et améliorer le fonctionnement du Conseil économique et social (ECOSOC) afin qu’il devienne un organe de surveillance des IFIs et des sociétés transnationales avec mise en place d’un système institutionnel de contrôle

3. Attribuer des compétences juridiquement contraignantes à la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement.

4. Rattacher les IFIs aux obligations internationales concernant le respect des règles des droits humains sous la surveillance du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme des Nations Unies

5. Rattacher les IFIs aux principes et règles du droit international, en particulier, aux dispositions de la Charte de l’ONU

** Dr. En Droit international. Chercheur au CADTM. Serpaj-Europe ** IPAM. Membre de Droit-Solidarité/AIJD

http://www.reseau-ipam.org/article.php3 ?id_article=636

vendredi, mars 03, 2006

NGOs Statement « on Innovative Sources of Financing for Development »

The enlarged « quadripartite» group, that includes Algeria, Germany, Brazil, Chile, Spain and France, has been working since the beginning of 2004 on propositions for innovative development funding mechanisms, including international taxation mechanisms. . More than 100 countries signed on to the « New York Declaration on Action against Hunger and Poverty », in September 2004 signalling initial support from the international community for the idea of launching such mechanisms.

In September 2005, 79 States supported the launching of a pilot mechanism in the form of a ‘solidarity contribution’ on plane tickets in a new statement titled the « Declaration on Innovative Sources of Financing Development ». France and Chile have already adopted a plane ticket tax, to be launched in 2006. The Paris conference on innovative mechanisms must be a new step in this process, by gathering together all the States which support this process.

In September 2005, a broad coalition of civil society organisations representing thousands of NGOs and citizens movement from all over the world called upon States to join this initiative. They also demanded that certain conditions be fulfilled for the initiative to truly raise finance for development. On the occasion of the Paris conference, these organisations reiterate their call in the following statement :



1- Support to governmental initiatives in favour of international taxation


We take note of this intergovernmental initiative to implement a pilot mechanism of international taxation for development funding. We welcome the involvement of Head of States and governments working on additional and innovative mechanisms, specifically on international taxes. This is because it would create a useful precedent, an essential step to launch and bring legitimacy to more ambitious taxation mechanisms of a universal scope.

Along with a considerable increase in Overseas development aid (ODA), debt cancellation, a revision of world trade rules and regulations, and the reform of International Financial Institutions, the implementing of international taxation mechanisms represents an important element to fund the MDGs. While generating new resources for development, it will also serve to improve the quality of the flows of international funds. Currently, the volatility of the ODA undermines the efforts made by recipient countries to set up sustainable development strategies. Financial resources that are entirely concessional (grants), stable and predictable are essential to reach the MDGs.

Therefore, we call upon all the Heads of States and Governments to support this initiative, by endorsing the “Declaration on Innovative Sources of Financing Development” and to commit themselves to implement this pilot mechanism, in 2006.



2-Implementing genuine taxation mechanisms

However, the diplomatic strategy of the « quadripartite » group to rally a « critical mass » of countries to this initiative must not alter the proposed mechanisms. We are deeply concerned about the absence of fundamental principles in the declaration, without which this pilot mechanism can only very marginally contribute to the funding of the MDGs including :

- Resources should be raised by compulsory taxes and not voluntary contributions which negate the principle of an international taxation and prevent the new flows from being stable and predictable.
- The fixing of a taxation rate high enough to supply new and significant resources.
- The incremental nature of the tax (distinction between economy and business classes) must not be optional but compulsory to make the tax burden weigh as a priority on high income players.
- Stipulating the additional nature of the resources raised. They must not make the Northern States back away from their commitment to dedicate 0,7% of their GDP to ODA; instead, they must be considered as mechanisms that generate additional resources.
- A link between the nature of the resources (new, stable and predictable resources over the long term) and their allocation (production of global public goods and development of the human asset over the long term). The new mechanisms must be applied to essential actions and programmes for which there is the highest need for stable and predictable resources.
- A method of support that involves a three-fold responsibility: that of the United Nations (since it deals with the respect of universal rights), of Governments(since the responsibility for development lies in their hands) and of civil society organisations (since it is people and communities who are confronted by poverty who are at the forefront in the fight against underdevelopment, poverty and contempt of human rights).

It is essential for all of these elements to be integrated in the pilot mechanism.



3- Affirmation of the need to implement an international taxation system


Our support to the launching of pilot mechanisms is set in the wider framework of calling for the implementation of a real international taxation system. We do not consider pilot mechanisms as mere innovative tools to fund development but as an embryo for global redistribution mechanisms. The UN report of 2005 on social development once again states that economic and financial globalization is increasing disparities and making the poorest populations ever more vulnerable. As a consequence the launch of innovative mechanisms must go hand in hand with the implementation of financial and fiscal regulations and solidarity. Taxes on the gains of the main beneficiaries of globalization (multinational companies, financial industries) and those that act against the general interest (environmental taxes) can be seen from this point of view as measures of justice.

We therefore ask the Head of the States and Governments involved not to content themselves with the launching of a pilot mechanism but to pursue their endeavour to implement more ambitious international taxation mechanisms and an international legislation to support them. Thus, we must continue to think of how to implement:

• An additional taxation system on the profits of transnational companies

• Taxation of international financial flows by both a currency transaction tax and a tax on bond transactions

• Environmental taxes that namely target the players who widely benefit from globalization and whose activity negatively impacts the environment.. This is the case, as an example, of air and sea transportation. In the same way, there is the need to tax the behaviour of economic actors that produce particularly negative environmental externalities in terms of the destruction of natural resources or the emission of greenhouse gases.


Finally, efforts to collect new international resources must go hand-in-hand with the strengthening of national fiscal regimes that should remain the priority. This requires a resolute fight against tax evasion, dumping and tax havens. We are grateful for the mention in the declaration of the fight again tax evasion, and we ask the ratifying States to commit themselves to much more ambitious objectives to this end. Tax evasion and tax havens leads to the loss of fiscal revenues running into hundreds of billions of dollars annually for countries in the Global North and South, consequently weakening fragile democratic processes in the countries of the South and that deprives their budgets of vital income. In this respect, opposite to what this declaration could lead to believe, the fight against tax evasion and tax havens is at least as much the responsibility of the countries of the North as of the countries of the South.


Contact :
Régis Mabilais, Coordination SUD (e-mail : europe@coordinationsud.org; tél. : + 33 1 44 72 87 13)

Signatory organisations :
-ABONG (National Platform of NGOs from Brazil, 270 members), Brazil.
-Asociación Chilena de ONGs (ACCION, National Platform of NGOs from Chile), Chile.

- AGEZ – Arbeitsgemeinschaft Entwicklungszusammenarbeit (Platform of Development Cooperation NGOs, 30 members), Austria
-Agir ici, France.
-AIDES, France.
-Alliance Sud (Platform of the 6 most important Swiss Development NGOs), Switzerland.
-Altermonde, Japan.
-AMC, Togo.
-AMEPOUH, Ivory Coast.
-ARCAD SIDA, Mali.
-Asociacion Latinoamericana de Organizaciones de Promocion (ALOP, Confederation of Latin American NGOs), Latin America.
-Association for Accountancy & Business Affairs, (UK professional organisation), United Kingdom.
-Associazione ONG Italiane (National Platform of Development NGOs from Italy, 160 members), Italy.
-ATTAC France.
-ATTAC Switzerland.
-Basc - Caritas Cameroon, Cameroon.
-BOF JEF, Senegal.
-Broederlijk Delen, Belgium.
-Canadian Council for International Co-operation (CCIC, National Platform of Development NGOs from Canada, 100 members), Canada.
-Caritas Espana, Spain.
-Catholic Institute for International Relations, United Kingdom.
-Centre pour la Promotion des Alternatives Economiques et Sociales, Cameroon.
-Cercle de coopération (National Platform of Development NGOs from Luxemburg), Luxemburg.
-CNCD- Opération 11.11.11 (French speaking Belgium Platform of Development NGOs, 108 members), Belgium.
-CIDSE (International network, 15 members).
-Collectif des Federations et Reseaux d'ONG du Bénin (National Platform of NGOs from Benin, 15 members), Benin.
-Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), France.
-Comité de Liaison des ONG du Tchad (National Platform of NGOs from Tchad), Tchad.
-CONGAD (National Platform of NGOs from Senegal), Senegal.
-CRID, (Network of Development NGOs, 50 members), France.
-Coordination SUD (National Platform of Development NGOs from France, 120 members), France.
-Coordinadora de ONG de Desarrollo (National Platform of Development NGOs from Spain, 110 members), Spain.
-CRBM/Mani Tese, Italy.

-Foundation For Grassroots Initiatives in Africa, Ghana
-Friends of the Earth France, France.
-International NGO Forum on Indonesian Development (INFID, International of NGOs working in Indonesia, 100 members), Indonesia.
-Institut pour un autre monde (IPAM), France.
-KENDREN, Kenya.
-KEPA - Service Centre for Development Cooperation (National Platform of development NGOs from Finland), Finland.
-Koepel van de Vlaamse Noord-Zuidbeweging – 11.11.11 (Flemish Platform of Development NGOs, 110 members), Belgium.
-Koordinierungsstell der Österreichischen Bischofskonferenz für Internationialae Entwicklung und Mission (KOO), 25 organisations, Austria.

-Liga Jubileu 2000 Angola (Network of Civil society organisations from Angola), Angola.

-Mieux Vivre avec le Sida (MVS), Niger.

-Network Institute for Global Democratization, Finland.

- Oikos - Cooperação e Desenvolvimento, Portugal.

-Plataforma Portuguesa das ONGD, (National Platform of Development NGOs from Portugal), Portugal.

-Public Interest Research Centre, India.

-Réseau des ONG de développement et des associations des droits de l’Homme et de la démocratie (National Platform of NGOs from Niger, 78 members), Niger.

-RSB, Ivory Coast.

-Ruban Rouge Côte d’Ivoire, Ivory Coast.

-Save the Children UK, United Kingdom.

-Secours catholique – Caritas France.

-Sidaction – Ensemble contre le SIDA, France.

-Solidarité SIDA, France.

-Stamp Out Poverty Network in the UK, (UK network of more than 50 charities, trade unions and faith groups), United Kingdom.
-Tax Justice Network (Coalition of 54 organisations), international network.
-The Bern Declaration, Switzerland.
-Unión Nacional de Instituciones para el Trabajo de Acción Social (UNITAS, Network of NGOs from Bolivia), Bolivia.
- Volontari del mondo – FOCSIV, Italy.
-Voluntary Action Network India (National Platform of NGOs from India, 2200 members), India.
-WEED - World Economy, Ecology & Development, Germany